La face cachée du sacrifice
Le sacrifice est un mot fort et chargé d’émotions lourdes.
As-tu déjà pensé de quelqu’un qu’il se sacrifiait pour quelque chose ? où as-tu l’impression de te sacrifier toi-même pour quelque chose ou pour quelqu’un dans ta vie ?
Si oui, je t’invite à lire cette petite histoire en gardant, dans un coin de ta tête, l’endroit de ta vie où tu as l’impression de te sacrifier.
Petit dialogue entre nous
L’idée de cet article m’a été insufflée par ma fille suite à un bel échange émouvant que nous avons eu sur le retour de l’école.
Lisy : « Maman, aujourd’hui j’ai bien aimé le cours de religion »
Moi : « Ah bon… Pourquoi ? »
Lisy : « Parce qu’on y a parlé du Père Damien »
Moi : « Aaah, et qu’est ce que tu as aimé dans l’histoire du père Damien ? »
Lisy : « Et bien, il s’est occupé toute sa vie de personnes malades. Il a décidé d’aller sur l’île des lépreux et cette maladie est horrible ! C’est incroyable ! Et tu sais, il a pensé arrêter à plusieurs reprises ! En définitive, il a continué et il est mort pour les autres. »
Moi : « Et tu en penses quoi de tout ça ? »
Lisy : « Moi, je ne saurais pas le faire. »
Moi : « Est-ce que tu peux voir qu’il a été heureux de faire ce qu’il a fait ? Qu’il n’est peut-être pas mort pour les autres comme tu l’entends ? »
…
J’adore ce genre de discussion. Cela me permet d’ouvrir le regard de mes enfants sur une partie de la réalité qu’ils ne voient peut-être pas. De plus, cela m’a permis de revoir l’histoire de ce prêtre belge mort à 49 ans après 16 ans de service auprès de 800 lépreux. Et admiré par Barak Obama 😉
L’histoire du père Damien
Jozef de Veuster est né le 03 janvier 1840 à Ninde dans le Brabant flamand. À 18 ans, il part à Braine le compte pour y parfaire son français.
À 19 ans, il demande son admission chez les Pères des Sacrés-Cœurs de Picpus, un ordre missionnaire chrétien fondé en 1800. Jozef choisit le nom de Damien pour nom religieux et prononce ses vœux en 1860.
En 1863, il embarque pour les îles du pacifique avec un groupe de missionnaires.
En 1864, il débarque à Honolulu où il est ordonné prêtre-missionnaire. À cette époque, la lèpre se propage très vite.
En 1865, le gouvernement décide de créer une léproserie à Molokai afin d’y déporter tous ceux qui étaient atteints de ce mal alors incurable.
L’arrivée du père Damien sur l’île de Molokai.
En 1873, en réponse à un appel de l’évêque, Damien s’engage comme volontaire pour apporter secours et soutien aux lépreux de l’île de Molokai.
Son investissement y est impressionnant : il construit une communauté, aménage des routes, construit une église, un hôpital, une école, un orphelinat, etc.
Il joue un rôle important dans la vie sociale, éducative et religieuse des lépreux en devenant tour à tour leur médecin, infirmier, entrepreneur de pompes funèbres ou menuisier.
Le père Damien attrape la lèpre
En 1884, Damien est atteint de la lèpre lui-même. Plus que la lèpre, ce qui le fait souffrir ce sont les soupçons et les incompréhensions que ses supérieurs lui témoignent. En effet, à cette époque, la lèpre étant associée à la syphilis, Damien a été soupçonné d’avoir eu des relations sexuelles. Il accepte donc de se soumettre à un test qui se révèle négatif.
Souffrant de la maladie, Damien continue ses activités. Il développe deux villages : Kalawao et Kalaupapa. Il s’occupe des canalisations d’eau, de l’agrandissement de l’hôpital, des routes entre les deux villages et de la reconstruction de l’église.
Parallèlement à cela, il s’observe et s’analyse afin de communiquer ses idées sur la propagation de la lèpre. Il continue à assumer sa mission jusqu’à 2 semaines avant sa mort, le 15 avril 1889.
Le 12 février 1889, il avait écrit une dernière lettre à son frère, le Père Pamphyle : « je suis toujours heureux et content, et quoique bien malade, je ne désire que l’accomplissement de la sainte volonté du bon Dieu… »
Le sacrifice vu sous un autre angle
« Il est mort pour les autres ». Et si ce n’était pas totalement vrai ?
Et si, autrement dit, le père Damien a vécu une vie durant laquelle il s’est senti pleinement vivant en se mettant au service des autres ? Si le Père Damien avait eu la chance de découvrir le sens de sa vie très tôt !
- Combien de personnes se donnent la mort parce qu’il ne trouve pas de sens à leur vie ?
- Qu’est-ce qui est le mieux ?
- Se sentir vide de sens ? Ne pas se sentir pleinement heureux et vivant, mais avoir la chance de vivre jusqu’à 100 ans ?
- Où mourir à 80 ans après avoir vécu une vie riche de sens ? Une vie dont chaque instant nous a fait nous sentir heureux et vivants ?
Se sacrifier pour une cause ou œuvrer pour un rêve ?
Que ce soit Nelson Mandela, Martin Luther King, mère Thérésa ou d’autres figures emblématiques, d’aucuns ne s’est sacrifiés pour une cause, mais tous ont œuvré pour leurs rêves. Ils ont posé des choix, accusé les conséquences et ont rencontré de gros challenges ! Ce faisant, ils ont vécu une vie riche, passionnée et passionnante, mais pas une vie de sacrifices.
- Pense à un de tes rêves ? Comment te sens-tu quand tu t’y connectes ?
- Connecté à ton rêve, dans cette énergie du « tout est possible », as-tu l’impression que ce que tu vas mettre en place pour y arriver relève du sacrifice ?
Non bien sûr. Pourtant, tu vas passer du temps, de l’énergie et de l’argent dessus. Tu vas peut-être faire des choix difficiles et tu vas prendre des risques et rencontrer des challenges. Pourtant, tu ne sacrifies ni ton temps, ni ton argent, ni ta sécurité, etc. mais tu vis pleinement le chemin de construction de ton rêve. Et ça te nourrit de te voir avancer.
Il est vrai que nous ne sommes pas tous capables de nous mettre au service des autres comme le Père Damien. Ou plutôt, nous n’en avons pas tous l’envie ! Tout comme nous n’avons pas tous envie de devenir marin, professeur des écoles, docteur, soldat, libraire, etc.
Si le Père Damien avait fait le choix de devenir vendeur de voitures, il aurait peut-être vécu quelques années de plus, mais il aurait peut-être été malheureux !
Le sacrifice est un choix dont les risques sont à la hauteur de la vie qui t’inspire.
Lisy : « Oui, mais c’est différent parce que, le père Damien il a pris des risques… »
Moi : « Il a pris des risques à la hauteur de la vie qui l’inspirait. »
Regarde ton rêve ! Entreprendre des choses pour le réaliser comporte des risques également. Bien sûr, ce ne sont peut-être pas des risques à la hauteur de ceux du Père Damien ! Mais ce sont les risques à la hauteur de TON rêve à toi.
L’énergie que tu ressens quand tu es connectée à ton rêve a la même substance que celle du Père Damien quand il œuvrait pour le sien. Cette énergie rend vivant, vibrant… La vie circule en toi bien plus que quand tu cherches à TE fuir par peur.
Tu sais, certains s’empêchent de faire ce qu’ils ont envie par peur de prendre des risques ! Et sur leur lit de mort, il regrette de ne pas avoir osé. Ils ont l’impression d’être passés à côté de leur vie.
Je ne te dis pas que tu dois faire n’importe quoi bien sûr. Je te dis que chaque chose que tu entreprends comporte des risques et qu’il serait dommage que, parce que tu n’oses pas prendre de risques, tu passes à côté de ta vie.
Lorsque nous sommes profondément habités par quelque chose et que nous osons l’exprimer, nous nous sentons alignés avec nous-mêmes. Nous nous sentons vivants, épanouis, heureux ! Le jeu, en vaut la chandelle !
Le bonheur ne signifie pas l’absence de malheur
Le bonheur ne signifie pas l’absence de malheur, l’absence de risques ou l’absence de challenges ! Le bonheur signifie que tu te sens à ta place dans ce que tu entreprends et ce, peu importe la forme que cela prend. L’adversité existe partout, même chez les gens heureux.
Tu as peur d’ouvrir ton restaurant alors que c’est un rêve qui t’anime depuis longtemps et tu choisis de rester commis toute ta vie en te disant qu’au moins, tu ne prends pas de risque ? Et bien, tu prends le risque de subir ta vie et de le regretter.
Le risque existe toujours derrière chaque choix que tu fais. Demande-toi si le choix que tu fais sert ton but ou ton rêve ou s’il sert ta peur !
Un risque se calcule bien sûr. Je ne te dis pas non plus de foncer tête baissée.
Lorsque tu te sens pousser vers quelque chose, calcule les risques et demande-toi, au préalable, comment les gérer s’ils arrivent. Ou comment t’en prémunir au maximum. En te préparant à toutes éventualités, tu te sentiras déjà plus confiant dans le fait de vouloir passer à l’action.
Même si le Père Damien se sentait protéger par la Vierge Marie, il savait qu’il y avait un risque. Et s’il n’a pas abandonné dans les moments difficiles, c’est qu’il se sentait à sa place auprès des lépreux.
Le sacrifice à une connotation négative et est souvent lié au statut de « victime ». Hors, il s’agit d’un renoncement choisi pour quelque chose qui a plus de valeur à nos yeux.
Savais-tu que, à l’époque des Mayas, le sacrifice humain était vu comme le plus insigne honneur auquel un Maya pouvait prétendre ?
Le sacrifice est un choix aligné avec ses valeurs.
Quand on dit qu’une mère se sacrifie pour ses enfants, en vérité, dans bien des cas, elle pose un choix aligné avec ses valeurs.
Par exemple : Passer du temps avec ses enfants la nourrit plus que booster sa carrière professionnelle.
Autrement dit, qu’est-ce qui lui apporte le plus de bonheur ? Être avec ses enfants ou sa réussite professionnelle ?
Où as-tu l’impression de faire un sacrifice dans ta vie ?
Tu penses peut-être toi-même que tu te sacrifies quelque part dans ta vie. Si c’est le cas, demande-toi si le « sacrifice » que tu penses faire n’est pas le résultat d’un choix qui sert une valeur plus importante à tes yeux. (Pour reprendre mon exemple ci-dessus, la maman « sacrifie » sa vie professionnelle pour servir sa présence auprès de ses enfants [qui la nourrit bien plus])
- Si oui, demande-toi quel aurait été le plus grand « sacrifice » ?
- Ne pas servir ce qui a le plus de valeur à tes yeux et valider le choix que tu n’as pas validé maintenant ? Et en assumer pleinement les conséquences ! (Dans mon exemple : Ne pas rester près de ses enfants et booster sa carrière.)
- Où maintenir ton choix en privilégiant ce qui a plus de valeur a tes yeux en assumant également les conséquences ? (exemple : maintenir sa présence auprès de ses enfants et assumer le fait que sa carrière passe après)
Le sacrifice est un choix que nous faisons en fonction de ce qui est le plus important pour nous. Ce choix implique des conséquences. Et, dépendant du regard et des valeurs de chacun, il sera jugé de stupide, héroïque, réfléchi, osé, etc. Certaines personnes te soutiendront, d’autres non. C’est comme ça et ça le sera quoi que tu fasses alors, écoutes le murmure de ton cœur qui te dit de faire ce qui te fait vibrer, ce qui est le plus juste pour toi et n’écoutes pas les voix extérieures.
Si tu as malgré tout l’impression que le choix que tu fais est sacrificiel, alors demande-toi comment tu peux faire autrement pour servir ton rêve, ton objectif ou ce qui fait sens pour toi.
Nous ne sommes pas victimes de nos choix, mais responsables des conséquences entrainées par nos choix. Oui, ta vie est la conséquence de tes choix. Cette phrase peut piquer certes, mais c’est la réalité. Tu n’aimes pas ta vie ? Change là en posant des choix différents de ce ceux que tu as posés jusqu’à présent.
Utilise les mots qui servent ton but
Aussi, la prochaine fois, au lieu de te dire :
« Je me sacrifie pour… » (Et ressentir la lourdeur de ce mot). Tu peux dire « je choisis… (de m’occuper de mes enfants) parce pour moi, c’est bien plus important que… (booster ma carrière) ».
À ce moment-là, ton esprit ne fait pas le lien avec ce à quoi tu renonces (la carrière), mais avec ce qui fait sens pour toi, ce vers quoi tu œuvres (le bien-être de tes enfants). Ce faisant, tu reprends la maitrise de ta vie au lieu de la subir.
Tu l’auras compris, malgré la connotation négative du mot « sacrifice », il définit un choix qui met une valeur ou un objectif en lumière.
Tu peux choisir de voir cette valeur/cet objectif, de reprendre le pouvoir sur ta vie et d’œuvrer en sa faveur. À ce moment-là, libre à toi :
- d’ajuster ton choix pour qu’il te corresponde plus ou
- d’assumer pleinement que ton choix entraine des conséquences.